Publication scientifique

DEEPLIFE dans Marine Environmental Research (2023)

Performance thermique et comparaison d’une espèce scléractiniaire mésophotique


Les écosystèmes coralliens mésophotiques (30-150m de profondeur) sont des oasis de biodiversité. Les travaux antérieurs du programme DEEPHOPE ont révélé que la diversité des coraux constructeurs de récifs (c’est-à-dire les coraux scléractiniaires) est étonnamment plus élevée dans la zone mésophotique (40-60m) que dans les récifs de surface, et que ces coraux mésophotiques échappent au blanchiment corallien (voir nos publications par Pérez-Rosales, 2021 & 2022).

Les coraux constructeurs de récifs coexistent avec les antipathaires, communément appelés coraux noirs. Les antipathaires sont particulièrement abondants aux profondeurs mésophotiques, où ils peuvent former des agrégations denses appelées forêts animales marines. Ces habitats servent de zones de reproduction, de nurserie et d’alimentation qui abritent diverses communautés animales et créent des points chauds de biodiversité.

Comprendre la capacité des coraux mésophotiques à faire face à un stress thermique est essentiel pour prédire comment le changement climatique façonnera l’avenir des récifs, de la surface à la zone mésophotique.

La collaboration entre UNDER THE POLE, l’Université Libre de Bruxelles et le Centre National Français de la Recherche Scientifique (CNRS) a permis d’évaluer pour la première fois la sensibilité thermique des coraux de la zone mésophotique profonde, à 85 m de profondeur (45 m au plus profond dans les études précédentes). La sensibilité des coraux profonds au réchauffement climatique a été comparée à celle des coraux présents à 25 m de profondeur.

L’échantillonnage des coraux (coraux constructeurs de récifs : Pachyseris speciosa, coraux noirs : Stichopathes sp.) a été réalisé à Mo’orea (Polynésie française) à 25 m et 85 m de profondeur par les plongeurs d’UNDER THE POLE. Les coraux ont ensuite été installés dans des aquariums de 200 L pour être exposés à différentes températures (23°C à 32°C) pendant 10 jours. Les performances thermiques et les réponses métaboliques des coraux ont été déterminées pour évaluer leur capacité à faire face à un stress thermique.

Ce travail révèle que les coraux constructeurs de récifs de la zone mésophotique ont une plus grande capacité à faire face au stress thermique que leurs congénères à 25 m de profondeur. Cela est probablement dû au fait que les colonies mésophotiques sont exposées à des températures de l’eau de mer plus variables, créées par la remontée d’eaux froides profondes, riches en nutriments (appelées vagues internes). En effet, à Mo’orea, la variabilité de la température augmente avec la profondeur, oscillant de 4,6 °C à 90 m contre 2,9 °C à 20 m.

Notre étude montre également que les coraux noirs manquent de plasticité par rapport aux coraux constructeurs de récifs en réponse à un stress thermique. Elle confirme nos résultats précédents démontrant que les coraux noirs ont une faible capacité d’acclimatation thermique. Le réchauffement climatique pourrait avoir des conséquences importantes pour cette espèce fondatrice de l’écosystème (voir notre publication par Godefroid et al., 2022).

En conclusion, la plus grande performance thermique des coraux mésophotiques met en évidence le rôle de la zone mésophotique en tant qu’oasis de biodiversité, résistante à un stress thermique. Les écosystèmes mésophotiques sont probablement plus tolérants au réchauffement climatique que leurs homologues moins profonds et leur prise en considération sera un atout important à l’avenir pour la gestion et la conservation de la biodiversité.

Résumé de la publication "Performance thermique en fonction de la profondeur : comparaison d’une espèce scléractiniaire mésophotique et d’une espèce d’antipathaire soumises aux ondes internes à Mo’orea, en Polynésie française"

Consultez le lien ci-dessous pour lire l'intégralité de la publication. 

Auteurs - Godefroid M., Dubois P., Under The Pole Consortium, Hédouin L.

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